La Saudi Pro League, arme de séduction par le foot

Le prince héritier Mohammed ben Salmane veut apporter une image moins archaïque du royaume.

Après le Qatar, Bahrein ou les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite se met à son tour à vouloir séduire à l’étranger. Soit par le sport, soit par la culture, soit par des projets pharaoniques payés à coup de pétrodollars.

Rien n’est trop beau ou trop cher pour la monarchie du Golfe. Jusqu’à présent, les seuls « touristes » à se rendre au royaume des Saoud étaient les pèlerins venant effectuer le hajj dans la ville sainte de La Mecque.

Avec la désignation du prince Mohammad ben Salmane comme héritier du trône, un vent nouveau de modernité a semblé souffler. Problème, ce vent s’est rapidement transformé en tempête avec l’exécution en 2018 du journaliste Jamal Khashoggi, reporter au Washington Post, dans le consulat d’Arabie saoudite à Istanbul par un commando saoudien dont il a été démontré qu’elle fut à tout le moins approuvée par MBS.

Mais, business as usual, et le temps faisant son affaire, le Royaume, après avoir regardé ce que faisait ses petits voisins, s’est à son tour mis à vouloir séduire par le sport, le tourisme et la culture, tout en lâchant un peu de lest au niveau intérieur, notamment concernant les droits des femmes. Cet assouplissement est tout relatif puisque la peine de mort n’est pas abolie, loin de là puisque l’Arabie saoudite a exécuté 196 condamnés en 2022, soit le plus haut chiffre de ces trente dernières années.

F1, Dakar, Jeux asiatiques d’hiver

Cette ouverture timide souffle le chaud et le froid. Le chaud avec la F1 ou le Dakar ; et à propos de froid, la désignation de l’Arabie saoudite comme pays hôte des Jeux asiatiques… d’hiver 2029 en aura surpris plus d’un. Situé en plein désert, au nord-ouest du pays, le site de ces Jeux abritera une mégapole futuriste, Neom, actuellement en construction, qui devrait accueillir derrière de gigantesques miroirs 9 millions d’habitants. La région, Trojena, est paraît-il un endroit montagneux où il n’est pas rare d’enregistrer des températures négatives en hiver, à défaut de précipitations… Mais on suppose que dans les 500 milliards de dollars prévus pour ces projets, la neige a dû être comptabilisée.

La Coupe du monde, un jour peut-être après la Saudi Pro League

La Coupe du monde au Qatar a également aiguisé l’appétit de MBS, d’autant plus que l’équipe nationale a déjà démontré par le passé qu’elle avait un niveau tout à fait intéressant, et ce n’est pas aux Diables rouges qu’il faut le rappeler. La victoire des Verts d’Hervé Renard face à l’Argentine au Qatar avait aussi marqué les esprits, même si ce succès allait se révéler sans lendemain.

L’idée d’organiser à leur tour la Coupe du monde en 2030 germait alors dans l’esprit de la famille Al Saoud et de son homme fort, MBS. Et tant qu’à faire, autant organiser cette manifestation de plus en plus barnumesque à plusieurs. D’où l’idée d’une candidature commune avec la Grèce et l’Égypte, ce qui en aurait fait le premier événement sportif organisé sur trois continents.

Mais ce 22 juin, le ministre des Affaires étrangères de la monarchie, Faisal ben Fahran Al Saoud a annoncé renoncer à cette candidature qui n’aurait pas pu rivaliser avec celle, également tripartite, de l’Espagne, du Maroc et du Portugal, sachant que l’Uruguay, le Chili et le Paraguay sont aussi dans les starting-blocks.

Rien n’est trop beau pour les clubs qui participent à la Saudi Pro League

Quant au présent mercato estival de la Saudi Pro League, il est marqué par les transferts mirobolants réalisés par les clubs locaux. Un an après Cristiano Ronaldo, le quintuple Ballon d’Or, attiré par le club le plus titré du pays, Al-Nassr, c’est au tour de Karim Benzema et de N’Golo Kanté de répondre aux sirènes des pétrodollars du club d’Al-Ittihad de Djeddah dont le capitaine est le défenseur international égyptien Ahmed Hegazi.

Toujours selon le journaliste Fabrizio Romano (Foot Mercato), c’est au tour de Callum Hudson-Odoi, de Chelsea, d’être courtisé par un club saoudien. D’après la Gazetta dello Sport, Al-Ittihad et son rival en Saudi League d’Al-Hilal Riyad ont également approché le milieu de terrain croate de l’Inter Milan Marcelo Brozovic (30 ans).

À défaut, Al-Hilal, club entraîné voici près de 15 ans par Georges Leekens puis Eric Gerets, pourrait se rabattre sur Bernardo Silva (Man City), si l’on en croit le journal espagnol Marca, après avoir un temps lorgné vers Eden Hazard en début de mercato.

Les joueurs qui acceptent un transfert en Saudi Arabia League ne cachent pas que l’argent est le moteur numéro un. Des sommes aussi mirobolantes sont aussi un moyen pour la monarchie d’engager des ambassadeurs qui ne pourront dire que du bien à propos de ce paradis sur terre qui leur permet de mettre à l’abri du besoin leur descendance jusqu’à la 40e génération.

En Saudi Pro League, Kanté touchera ainsi 25 millions d’euros de salaire annuel. Tant dit que Benzema 27,5 millions. Sans compter les accords commerciaux et les droits à l’image de ces deux stars. Ce qui devrait faire monter leurs revenus à respectivement 100 et 200 millions d’euros par année de contrat.

D’autres joueurs ont néanmoins refusé de se perdre là-bas, au premier rang desquels Lionel Messi et Lucas Modric.